mardi 4 juin 2013

L'échenillage* de la vigne de la Haumuche.



 Depuis plus d'un mois que la vigne a débourré, les sarments se sont développés un peu partout le long des ceps. Comme il n'y a plus de risques de gelées, il est temps de supprimer les jeunes pousses indésirables. Cet échenillage, en Français épamprage, est une opération qui s'effectue à la main. On caresse le tronc du cep en supprimant au passage bourgeons et jeunes branches, des gourmands, pour ne laisser que les sarments qui avaient été espérés lors de la taille. En général, ces gourmands ne sont pas porteurs de fleurs.  Ils vont pousser au détriment des sarments chargés de fruits et des bois pour l'année prochaine. Ils donnent un aspect disgracieux aux ceps. Trop près du sol, les feuilles de ces gourmands pourraient se retrouver aspergées de désherbant et provoquer la mort du cep. En plus cela facilitera grandement la taille de l'an prochain car il y aura bien moins de branches à couper. Il y a donc plein de bonnes raisons d'effectuer cette opération salutaire pour mes chers ceps. 

La vigne de la Haumuche est envahie par les boutons d'or.
J'en profite aussi pour arracher l'herbe qui ne manque pas de pousser au pied des ceps. Cette année, c'est une herbe vigoureuse ma foi, qui se nourrit de l'engrais que j'avais répandu après la taille. Je n'ose pas la couper à l'aide de la débroussailleuse, car j'ai peur d'érusser (de blesser la peau) l'écorce fragile du pied de vigne avec le fil nylon. Avec ce printemps exceptionnel, un des plus humides, froids et non ensoleillés que la météo a connus, la végétation ne se comporte pas comme d'habitude. La vigne pousse au ralenti, mais certaines herbes sauvages se sentent bien sous ce climat et ont profité de l'absence de Grand Mildiou pour envahir la vigne.

La vigne est envahie de boutons d'or. Il y a aussi peut-être quelques pieds de benoite des prés.
Je ne sais pas bien les distinguer. Le bouton d'or est plutôt toxique, tandis que la benoite, beaucoup plus petite, est pleine de vertus médicinales.

Tout en haut de la vigne, le premier rang est envahi par les boutons d'or.
En arrière-plan, derrière la haie, on distingue le tracteur de l'agriculteur voisin tirant un énorme pulvérisateur.
A l'odeur j'ai cru reconnaître que du désherbant était répandu dans l'immense champ jouxtant la vigne au Sud !
Les vacances de printemps de Grand Mildiou.
Et oui Grand Mildiou a délaissé sa vigne pendant presqu'un mois. Pendant ses "congés", il s'est d'abord transformé en monteur de cuisine IKEA à Issy Les Moulineaux (Il aurait fallu voir le Grand Scenic, fort grand heureusement, bourré dedans comme dessus avec 83 colis, plus de 600 kg de placards en kit, tiroirs, cartons...). Ensuite, il s'est offert les championnats de France de golf du CNRS à Aurillac (sans neige) et là-bas, l'organisateur a promulgué un classement fait exprès pour empêcher le duo Penot - Roland de gagner (un classement en brut, comme c'est la coutume, leur aurait donné une large victoire, mais en net avec un handicap bien plus bas que toutes les autres équipes, ils n'ont terminé que 3ème.).  Grand Mildiou a fini son périple en tant que charpentier couvreur à Lille et il a fait beau à Lille. Maintenant quand il pleut, l'eau qui tombe sur le toit de l’appentis ne s'écoule plus sur les vélos d'Aline, mais dans le réservoir de 250 L qui a été installé contre la dalle. Grand Mildiou et sa compagne La Suette y ont fait aussi la connaissance du dernier né de la famille, Camille, un bébé magnifique qui prend le sein de sa mère avec beaucoup de grâce. 

Désherbage à genoux.
Bref, au retour, la pauvre vigne était dans un piteux état.Toute la semaine, à raison de 3 heures au moins par jour, c'est à genoux (pour ne pas fatiguer le dos) que chaque cep a été débarrassé des mauvaises herbes qui l'étouffaient, des gourmands  mal placés, des nids de fourmis qui se  bâtissaient le long du tronc. Quelques cailloux ont été replacés aussi au pied de certains troncs. Même en se dépêchant un peu, il fallait bien une bonne minute parfois pour bichonner un cep. Et comme il y en a 1036, c'est en gros 18 heures qui ont été nécessaires pour que la vigne retrouve un aspect civilisé.
Un cep avant échenillage.
Le même cep, après échenillage.














J'en ai profité aussi pour examiner les jeunes ceps encore protégés par le tube de plastique jaune ou le grillage bleu. Dans les tubes, j'ai vu quelques cochenilles (cette fois elles sont vraies)  accrochées à l'abri sur le tronc encore tendre. Les grillages eux sont difficiles à désherber. Le liseron par exemple s'entrelace dans les mailles et casse. Je ne peux pas l'étaler comme il faut par terre, pour le traiter ensuite au désherbant spécial liseron.C'est le moyen le plus efficace que j'ai trouvé pour me débarrasser de cette plante envahissante. Imaginez un peu vendanger du Noah envahi par le liseron ! Avant ce désherbage manuel, j'ai quand même passé le fil en bordure des rangs et entre les ceps pour me donner un peu moins de travail ensuite car moins de longues herbes à arracher se présentaient à mes mains munies d'une truelle et d'un vieux sécateur-échenilleur.

Le sécateur-échenilleur.
Ah ! c'est un outil un peu spécial, un sécateur qui possède une minuscule hachette au dos d'une de ses mâchoires et qui lui donne une allure de cacatoès. Je l'ai trouvé tout rouillé tout grippé dans le fond du chai. Je l'ai rénové. Une électrolyse à la lessive Saint Marc, c'est formidable pour enlever la rouille sans détériorer l'objet. Bien aiguisé et affuté, il fonctionne parfaitement. La hachette me permet de sectionner des gourmands au niveau du sol, et le sécateur de  couper un bois mort ou de rattraper un oubli lors de la taille. Je ne sais pas si cet outil était fait pour ça au départ mais sa nouvelle fonction lui convient très bien.
Le sécateur - échenilleur, trouvé au fond du chai.
Le second outil que j'utilise est une simple truelle langue de chat. Il y a 3 ou 4 ans j'ai imaginé un outil spécial : une truelle de maçon triangulaire dont j'ai scié la pointe de façon à en former une double. J'avais aussi rajouté un tenon de bois en travers du manche pour bloquer la main quand j'enfonçais l'outil dans la terre. Les racines prises entre les 2 pointes s'arrachaient alors facilement en faisant levier. je n'ai pas réussi à remettre la main sur ma truelle à double pointe, dommage, j'aurais gagné un peu de temps.

Le résultat des courses.

 Après tous ces efforts, je suis assez content du résultat. La vigne a retrouvé un aspect tout à fait présentable. J'en suis même un peu fier et soulagé d'avoir su préserver ce patrimoine inestimable. C'est vrai qu'elle est bien belle la vigne en cette fin de printemps. Les jeunes pousses sont bien vertes, brillantes. Elles luisent au soleil donnant l'illusion d'une bande végétale suspendue au-dessus de ces jolis ceps bruns, avec de nombreuses fleurs en formation qui pointent au sommet des sarments encore courts. On peut, à ce moment, rêver d'une grande récolte de qualité. L'ensemble est aéré, bien équilibré, les travaux à venir seront bien plus faciles. Les traitements contre les maladies seront à faire avant les prochaines pluies, ça va aller vite avec une vigne dans cet état. Je vais aussi pouvoir retarder au maximum le traitement chimique des herbes sauvages et ainsi avoir des rangs propres jusqu'aux vendanges sans trop user de polluants.

L'échenillage est terminé et le passage de la tondeuse a fait disparaître toute trace d'herbes arrachées.
* échenillage  : c'est le terme que j'ai toujours entendu prononcer
par mon père et mon grand-père pour désigner
l'opération qui consiste à supprimer, au printemps,
les jeunes pousses. Muni de
gants solides,
on enlève les bourgeons et les jeunes branches en passant sa main
autour du  tronc, en remontant jusqu'aux onglets.
 

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